Bienvenue sur le sixieme continent : l’Antarctique !
Click to enlarge Voici quelques nouvelles bien fraîches de la base DDU (66°40’S-140°01’E) et de l’équipe de la 57ème mission qui va tenter l’intégration à l’autochtone : le Manchot Adélie…

17 mai 2009

Les photos de l'exposition "Rencontres sur la banquise", qui se déroule au centre vétérinaire de la faune sauvage à Nantes d'avril à octobre 2009 (parrainée par Pfizer)

Ombres




Chant




Parmi eux




En chasse




Catabatique




Bien au chaud




Débâcle




Oeuf




Marsouinent




Lever de lune




Trou de Phoque




Oasis




Convoi




Parade




Manteau




Pyjamas




"S"




Tortue




Interface




Paires




Complices




Sur berg




Processions




Becquée




Pancakes




Tabulaire




Crèche




Pyramide




Colonne




Plongeoir

26 févr. 2008

La dernière banquise

Décembre. La Terre Adélie s’enfonce un peu plus dans l’été antarctique, les températures se rapprochent des zéro degrés, les bonnets et les gants sont désormais rangés au placard, la vie grouille sur la glace et dans les airs. Désormais, même si le soleil se couche encore quelques heures derrière le continent, la nuit n’existe plus et les aurores sont devenues trop timides pour être vues. Mais la banquise, elle, est toujours là, résistant malgré tout. La violence des vents d’été n’est pas suffisante pour briser cette dernière banquise qui avait repris en août à la suite d’une débâcle hivernale après avoir été bien mal menée par les tempêtes dans ses premiers mois de vie. Mais la chaleur et les courants l’affaiblissent : elle s’affine, devient poreuse, noire. Les rivières ne se referment plus et au pied des bergs la constante agitation par les habitants et la houle crée de véritables douves isolant ces châteaux de glace. Mais la tempête qui conduirait à une débâcle générale ne vient toujours pas, on profite encore un peu chaque jour de la banquise sans savoir si demain elle sera encore là.
Mais la vie grouille dans les brèches éparses de la banquise : des groupes de manchots Adélie et de manchots Empereur se croisent aux pieds des bergs quand ce n’est pas un phoque crabier ou un jeune Weddell et sa mère qui sortent de l’eau pour prendre un bain de soleil quelques heures en surface. L’été permet de profiter pleinement de ce spectacle sans souffrir du froid pinçant qui nous saisissait progressivement jusqu’à devenir insupportable. Le doigt ne gèle plus sur le déclencheur de l’appareil photo. Les orteils ne s’endolorissent pas en restant quelques instants immobiles. Sous la surface, les Adélie nagent en groupe comme un banc de poisson, une tactique pour se protéger du léopard de mer. L’orque est également prédateur mais plus rarement présent près de nos côtes. Lorsqu’un premier Adélie sort en surface, il est rapidement suivi par une dizaine d’autres manchots, parfois même un Empereur parmi eux, plus calme et plus gracieux. L’Adélie reste immobile quelques instants comme un flotteur, la tête immergée pour jeter un regard constant sous la surface, avant de repartir sous l’eau aussi rapidement qu’il avait surgi. Ses ailerons rigides animés par de puissants muscles pectoraux lui permettent de descendre rapidement en profondeur malgré sa flottabilité positive. On voudrait presque plonger avec tous ces manchots en oubliant à quel point l’eau est encore glaciale.

Photos :
Rostand : Le soleil de minuit au-dessus de la tour de Pise de l’île Rostand.

Noire : La banquise s’affine progressivement sous la montée des températures et les toujours plus puissants rayons du soleil : elle prend cette teinte noire dans les portions les plus fines, presque trop fines pour supporter le poids d’un homme.

Babel : Les tours de Babel devenues grises révèlent la finesse de la banquise.

Adélie : Les Adélie qui viennent de jeûner à terre sur leur nid, doivent parcourir cette banquise exceptionnellement étendue pour la saison, avant de trouver la porte vers la mer et leur nourriture.

Bergs : Les bergs qui nous ont accompagnés tout l’hiver accumulent les marques des tempêtes : de nombreuses failles et des éboulis à leurs pieds.

Tours-Bergs : Tout autour des bergs, ce sont de larges zones d’eau libre où baignent quelques pancakes.

Intrus : Un promeneur au milieu d’une foule de manchots.

Même bain : Dans les zones d’eau libre, la croisée des Adélie et des Empereurs qui partent ou reviennent de leur voyage alimentaire.

Juvénile-veau : Les jeunes Weddell âgés de presque 3 mois prennent leurs dernières tétées alors qu’ils sont déjà bien grands et bien gras.

Juvénile : D’autres jeunes Weddell ; profitant des percés dans la banquise, apparaissent déjà seul, sans leur mère, en surface de la banquise.

Adélie dans l'eau-1 : Un premier adélie apparaît brusquement en surface avant d’être rejoint par le reste de son groupe.

Adélie dans l'eau-2 : L’Adélie flotte en surface comme un bouchon, avant de « s’envoler » sous la surface.

Regard : Un Adélie la tête immergée craignant l’attaque d’un léopard ?

7 déc. 2007

Plus au Sud

A DDU, c’est déjà l’effervescence estivale. 50 personnes s’activent pour décharger le bateau coincé dans les glaces à 100 km au nord, faire le plein de vivres et de fuel pour la base, organiser les nouvelles manip scientifiques et préparer les chantiers de l’été. Là-bas à 1500km plus au sud sur la calotte de glace continentale, il y a encore des hommes isolés du reste du monde. La station franco-italienne de Concordia est construite sur le dôme C, le 3ème « sommet » de glace du continent à plus de 3 000m d’altitude. Cette station est ravitaillée par trois raids terrestres qui partent chaque été depuis la base de Cap Prud’homme près DDU. Un raid c’est une aventure d’une dizaine de jour sur le grand désert continentale : 1500 km de blanc absolu, sans relief, sans contraste.
La zone côtière du continent est la plus hostile. Tout d’abord par sa falaise d’une cinquantaine de mètre de haut. Les points d’accès sont rares mais c’est le cas de Cap Prud’homme dont les roches affleurent et forment une brèche dans la muraille impénétrable de la calotte. Ensuite, la glace continentale présente une pente très raide sur les premières centaines de kilomètres avant d’atteindre une zone de plateau à pente douce. Cette pente est trop raide pour permettre aux véhicules d’emmener de lourdes charges dans les premiers kilomètres. Il y a donc l’étape de « pré-acheminement » : une journée aller-retour à 50 km à l’intérieur du continent pour emmener les premières caravanes. C’est aussi une formidable occasion pour nous, anciens hivernants, de participer un peu au raid, d’aller plus loin au sud voir à quoi ressemble ce continent que l’on avait à peine d’effleuré au cours de quelques balades hivernales.
Les conditions climatiques sont les plus rigoureuses près des côtes : les vents catabatiques peuvent déferler avec un maximum de force, les dépressions côtières violentes tournent le long des côtes de l’Antarctique alors que la majorité du continent se trouve sous un fort anticyclone constant. Ce sont donc des sastrugis incessants sur des centaines de kilomètres, des risques de blizzards avec une perte rapide de la visibilité, des vents glacials et parfois si violents qu’ils bloquent l’avancée des engins. La dameuse, un Kassböhrer qu’on appelle couramment « Kass » est le véhicule de tête et a pour rôle de lisser un maximum la piste pour permettre aux engins et leurs lourdes caravanes d’avancer plus aisément et avec le moins de chocs possible. Dans le désert, son rôle essentiel est aussi de tracer la route du convoi par système GPS : il trace une ligne droite entre D10 et Concordia.
Derrière ce sont d’énormes tracteurs, des « challengers », qui tirent de lourdes caravanes : du fuel, des vivres, et tout le matériel scientifique et technique pour une année.
Nous voilà donc parti à Prud’homme pour rejoindre l’équipe qui prépare les raids et les véhicules : des énormes machines. Je ne sais pas ce qu’on aurait pu préférer entre une jolie vue plongeante sur la banquise avant de disparaître dans le blanc et une montée dans un blizzard épais. On a eu le blizzard et il nous a fait revivre les tempêtes de l’hiver sur la banquise. La visibilité est rapidement tombée à quelques mètres, il fallait suivre le Kass ou le tracteur de devant de près pour ne jamais le perdre de vue. Dans ce paysage, il suffit d’un tour complet sur soi-même pour être définitivement perdu. On avançait dans la neige soulevée, à damer les sastrugis, lisser au mieux les bosses, tracer la route en suivant les infos du satellite. Plus de 13 heures dans cette tempête sans aucune évolution du paysage à travers le pare-brise et au bilan à peine 100 km parcouru : un aperçu de l’hostilité par excellence de ce continent…


Kass : La dameuse, véhicule de tête qui se charge de tracer et lisser la piste sur le continent.

Challenger : Un énorme tracteur capable de tirer les charges des caravanes.

Attelage : La phase d’attelage des cuves de fuel, stockées à D10, aux challengers.

D10 : La montée des challengers vers D10, au fond l’horizon est nuageux au-dessus de la banquise.

Crevasses : Peu après D10, c’est la zone la plus dangereuses à cause de nouvelles crevasses qui peuvent s’ouvrir dans cette zone au cours de l’hiver.

Blizzard1 : Le blizzard s’épaissit avec la montée sur le continent.

Caravane : Le convoi du raid dans le blizzard.

Blizzard2 : Un challenger coincé dans une bosse, il faut sortir dételer malgré les conditions.

Soir : Même si le soleil ne se couche plus, le soir venu, le blizzard s’obscurcit.

Nuit bleue : Un challenger trace la route de retour avec ses phares puissants dans cette nuit « bleue » .

Arrivée : Le retour sur la base de Prud’homme où la visibilité est meilleure.